29 avril 2008

Rencontres autour du oud : Adel Salameh

Nous débutons ici une série de rencontres autour du oud, le « luth arabe ». La proposition est de s’entretenir avec des oudistes principalement, de différentes traditions et approches musicales, mais aussi avec d’autres personnes liées à l’instrument (fabricants, autres musiciens, etc). Au-delà de l’instrument, le but est d’explorer la richesse et la complexité des musiques arabes et leurs développements contemporains. Notre premier entretien a pour cadre les docks de Marseille, dans lesquels nous rencontrons Adel Salameh à l’occasion du salon Babelmed.

Votre dernier disque s’appelle Rissala. Ce mot a-t-il une signification précise ?


Adel Salameh Oui et c’est très important, ça veut dire « message », message de paix et d’espoir, pour nous les Palestiniens, mais aussi pour le rapprochement des individus, quels qu’ils soient. Ce disque est le résultat d’une collaboration arabe : moi-même au oud, Palestinien vivant en France, ma femme la chanteuse algérienne Naziha Azzouz, le Tunisien Ali Mnejja à l’accordéon, le violoniste marocain Mohamed Zeftari et l’Egyptien Adel Shams El Din au riq.

Vous parlez de message de paix et la presse vous donne souvent le titre d’ambassadeur de la culture arabe. Voilà qui rappelle, par exemple, la démarche de Marcel Khalife ou celle des Frères Joubran...

Chacun a sa propre démarche. Je suis engagé par la cause palestinienne car je suis né là-bas et ma famille y vit toujours. J’essaye d’y aller le plus souvent. Mais il y a une autre dimension, c’est celle de la collaboration entre artistes du monde et c’est vital pour les artistes palestiniens. Vous savez, les frontières sont fermées, mais la musique est là pour atteindre à l’international, pour créer l’ouverture. J’ai eu la chance de voyager au Japon, en Nouvelle-Zélande, aux États-Unis, en Europe. Transmettre des messages est un devoir pour moi, ainsi que de donner une image de la culture palestinienne. L’enjeu, c’est affirmer que le peuple palestinien existe, c’est fondamental. Pour moi, la résistance palestinienne à l’occupation n’est pas différente de la résistance française à l’occupation durant la Seconde Guerre mondiale.

À cette différence que cette occupation dure depuis soixante ans...

En effet. Nous voulons en vivre en paix dans notre pays, avec tout le monde, mais ça ne sera pas possible tant qu’on niera notre identité.

En concert, vous dites ce message uniquement avec la musique ou aussi avec des mots ?

Je laisse la musique parler. Avant tout, nous sommes des artistes engagés. Je ne peux pas oublier que je suis né à Nablouse et que j’ai grandi à Tulkarem. Je ne peux pas oublier ma famille ni la destruction de mon peuple. Je suis toujours face à ce monstre, mais je laisse la musique l’exprimer.

D’où votre carrière internationale, notamment dans les festivals Womad.

En effet, j’ai collaboré avec Peter Gabriel et Real World durant plus de dix ans. J’enregistre actuellement pour le label Enja, aux côtés de musiciens comme Rabih Abou-Khalil, Louis Sclavis, Renaud Garcia-Fons... C’est un excellent label distribué en France par Harmonia Mundi. (...)

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