08 mars 2007

Daby Touré, deux en un

Stereo Spirit, c’est ainsi que Daby Touré a baptisé son nouvel opus comme une allégorie de sa propre vie. Fils de l’Afrique, grandi entre Mauritanie et Sénégal, et enfant du monde moderne, il est le griot de ses propres humeurs et élans qu’il couche avec délicatesse et talent sur des musiques aux arrangements "pop". Rencontre.

Daby Touré sera l'invité de l'émission Musiques du monde le mardi 27 mars : + d'info

Un passé chargé. Un père médecin et musicien qui ne souhaite pas que son fils le devienne. Une enfance tout en aller-retour entre le désert mauritanien et la Casamance, au sud du Sénégal. Un passage à l’âge adulte marqué par une transplantation sur le sol français, quand son père Hamidou Touré, rejoint ses frères Sixu et Ismaël au sein des déjà légendaires Touré Kunda. Voilà en quelques phrases, le profil de ce musicien "fils de", qui a su se faire un prénom, trouver son propre son.

"Je suis né en plein désert, confie Daby Touré, mais c’est réellement à Djéole, en Casamance, au contact des cultures soninké, toucouleur et wolof que s’est forgée ma personnalité. A l’adolescence, je suis revenu à Nouakchott avant de m’envoler en 1989 pour la France avec mon père" relate Daby Touré avant de tracer une sorte d’itinéraire bis, plus musical. "Très jeune, j’ai baigné dans un environnement traditionnel, bercé par les instruments de mes ancêtres. Ce n’est qu’à l’adolescence que j’ai été attiré par la guitare et que j’ai commencé à m’intéresser aux autres musiques. Mais le véritable déclencheur a été mon arrivée en France. C’est là que j’ai pu commencer à jouer avec des musiciens d’autres cultures".

Laddé, un premier album enregistré avec son cousin Omar sous le nom de Touré Touré sort en 1999. Convaincu qu’il n’avancera bien que seul aux commandes, Daby s’enferme dans sa chambre et compose, arrange et fignole sur son home-studio le squelette de Diam, un premier solo signé par Realworld, le label de Peter Gabriel, en 2004. Les fondations sont déjà profondément ancrées en terre pop.

Un bon traitement

"Depuis, je n’ai pas arrêté de composer, explique Daby Touré. De manière spontanée, serai-je tenté d’ajouter. Même si j’ai parfois prévu des choses, anticipé des constructions, je les ai souvent modifiées. C’est en fait un album assez spontané où les couleurs se sont imposées d’elle-même comme par évidence. Simplement. Parce qu’elle me faisait du bien. En cela, je peux dire que la musique est une thérapie pour moi" précise celui qui affirme avoir besoin de cela pour vivre. "En fait, la musique me permet d’unifier ou plutôt de mettre en relation, de faire le pont entre les différentes cultures qui sont les miennes. Stereo Spirit, reflète tout à fait cela".

Effectivement, la douzaine de plages de ce nouvel album tisse des liens entre son héritage culturel pastoral et son quotidien, son urbanité actuelle. "J’ai réalisé lors d’une tournée aux Etats-Unis, que je pouvais aussi bien vivre à New York qu’à Paris ou dans mon village en Afrique, que j’étais à l’aise dans tous ses pays, dans toutes ses cultures. Sentiment que je ressens exactement de la même manière lorsque que je rentre en Mauritanie ou au Sénégal. Je suis bien partout en fait… " avoue ce "terrien qui n’a pas peur d’évoluer" comme il se définit lui-même.

"Tout resserrer sur moi…"

Auteur, compositeur, arrangeur et réalisateur de ce Stereo Spirit, Daby Touré a choisi d’occuper tous les postes clés dans la conception de cet album. "J’espère avoir été au plus loin de ce que je pouvais. J’ai travaillé plusieurs années comme musicien au sein de formations. J’ai aussi bossé en duo avec mon cousin (Omar Touré avec qui il forme les Touré Touré - NDR), je sais par expérience que si je veux pouvoir affirmer mon son, j’ai besoin de tout faire. A l’époque des Stones ou des Beatles, les groupes étaient fixes sur plusieurs années. Les musiciens s’y consacraient pleinement. Un groupe avait de fait, le temps et les moyens de parvenir à une certaine maturité, à une certaine maîtrise du son.

Je n’ai jamais eu ce temps, jamais eu la possibilité de pousser à plusieurs cette recherche de cohérence, ce travail de laboratoire. C’est pourquoi j’ai décidé de tout resserrer sur moi" confie-t-il avant de revenir sur le rôle tenu par Bob Coke qui l’a conseillé, assisté dans la réalisation de cet album. "Bob est un grand producteur qui a, par exemple travaillé sur le premier Ben Harper. Il m’a apporté plus de maturité et d’expérience ainsi qu’une certaine assurance et une oreille que je n’avais pas. C‘est comme un recul indispensable, une distance nécessaire avec ce que tu crées" analyse le créateur et ultime décideur sur cet album.

Un optimiste pratiquant…

Si Daby est le seul maître à bord de son Stereo Spirit, cet album n’est en rien égocentré. "Mes chansons parlent des enfants, de l’affection qu’ils sont en droit de recevoir, de l’amour entre les êtres humains et des relations complexes qu’ils entretiennent. Ce sont des histoires vécues directement ou indirectement, des histoires différentes les unes des autres" résume Daby Touré. "C’est un album optimiste. De toute façon, on n’a pas le choix, on doit le rester. Parfois, je lis dans un regard tant de beauté et de sincérité que je me dis que j’ai bien fait d’y croire."

Daby Touré Stereo Spirit. (Realworld/V irgin/EMI) 2007 Le 20 mars à la Cigale à Paris

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